LES MAISONS ECLUSIERES DE LESPINASSE ET DE BORDENEUVE SUR LE CANAL DE GARONNE.

 

 

Le canal des deux mers est constitué du canal du midi ( Toulouse Sète 240 kms) et du canal de Garonne ( Toulouse Castets-en- D’orthes 193 kms).

 

 

Les deux maisons éclusières du canal de Garonne implantées sur la commune de Lespinasse sont liées à notre histoire.

 

 

Rappel historique

 

La liaison de l’ Océan Atlantique à la mer Méditerranée par la voie fluviale représente un atout majeur sur le plan économique du Royaume de France. Depuis l’ Antiquité , des dirigeants comme Néron, Auguste, Charlemagne, François 1er, Charles IX et Henri IV y ont songé…. Au XVII° siècle sous le règne le Louis XIV , Pierre Paul Riquet alors percepteur de la gabelle en Languedoc souhaite sa réalisation. En octobre 1666 par un Edit Royal Colbert autorise les travaux. L’inauguration du « Canal Royal en Languedoc » aura lieu le 15 mai 1681 reliant Toulouse à Sète. De 1686 à 1694, Vauban va le rénover par des travaux supplémentaires et la réalisation de quarante-neuf aqueducs et ponts-canaux.

 

La conception du canal latéral à la Garonne, devenu Canal de Garonne en 2001, pour joindre Toulouse à Bordeaux , remonte à Vauban ( 1633-1707)

Ce nouvel ouvrage prend le relais du canal du midi par le biais du bassin de l’embouchure, aux Ponts-Jumeaux à Toulouse. Il se termine côté atlantique, dans la Garonne à Castets-en-Dorthe après un parcours de 193 km. Il est desservi par 53 écluses et soumis à une dénivellation de 120 mètres environ. Celui-ci traverse au fil de l’eau les départements de la Haute-Garonne, le Tarn-et-Garonne, le Lot et Garonne , la Gironde soit deux régions au poids économique important, Midi-Pyrénées et Aquitaine.

Commencé en 1838, le canal de Garonne a été livré progressivement à la fin 1844 entre Toulouse, Montech et Montauban.

En 1845 il s’ouvre jusqu’à Moissac. Le 10 décembre 1849, jusqu’à Agen , début 1852 jusqu’à la Baïse et enfin le 1eravril 1856, jusqu’à Castes-en-dorthe ( Gironde), soit une longueur de 193 kilomètres.

 

Le canal possède quatre embranchements, le canal de Brienne, le Canal de Montech, la descente dans le Tarn à Moissac et la descente en Baise à Buzet-sur Baise. Un cinquième embranchement existe également à l’origine de sa construction au niveau de la dérivation de prise d’eau d’ Agen .Il sert à l’alimentation en eau grâce à un « canalet » et à l’ancien barrage à aiguilles de « Beauregard ». Ce système «  à aiguilles » à disparu en 1972 , jugé trop dangereux par les éclusiers barragistes qui comptent cinq morts depuis sa construction en 1847.

 

Longtemps oublié et rarement considéré comme économiquement viable, le Canal de Garonne représente aujourd’hui un enjeu touristique pour les départements qu’il traverse, avec ses paysages parmi les plus beaux et les plus préservés. Son atout majeur réside dans une intégration tout en douceur dans le milieu naturel. Tel n’est pas le cas aujourd’hui des autoroutes ou tracés de lignes LGV ( lignes à grande vitesse).


Les écluses de Lespinasse et de Bordeneuve : 

 

Dans la première moitié du XIX° siècle, la France et le reste de l’Europe connaissent d’importantes transformations grâce à l’essor des sciences et de l’industrie. C’est «  la révolution industrielle », Les progrès techniques et hydrauliques, les applications à la machine à vapeur à la batellerie fluviale, une situation financière plus favorable permettent d’envisager un vaste programme d’amélioration et de développement des voies d’eau. Nous sommes dans le siècle de Gustave Eiffel…… Durant les premières années du premier Empire et pendant la Restauration ( 1815-1830) un gigantesque plan de voie de navigation est réalisé. C’est sous le gouvernement de Louis-Philippe que la loi du 6 juillet 1838 autorise la construction du canal sur toute son étendue actuelle. L’état finance et prend en charge sa réalisation.

 

C’est à cette période que les maisons éclusières qui bordent cette voie d’eau sont réalisées . Leur architecture , à quelques variantes près est commune à l’ensemble des 53 maisons qui bordent le canal de Toulouse et Castel en dorthes. Elles son réalisées en pierre de taille, solidement construites, aux fondations profondes, édifiées sur un espace sous voûte qui accueille parfois l’écurie comme celle de Lespinasse . De forme compacte et cubique Elle se composent d’un rez- de- chaussée., d’un premier étage et de combles. Elles sont le plus souvent entourées d’arbres fruitiers , potager, bûcher au gré des aménagements réalisés par les éclusières et éclusiers successifs.

Les maisons d’écluses de notre commune, comme un grand nombre d’entres elles voient rapidement arriver le rail à leurs pieds. Depuis plus d’un siècle des milliers et des milliers de trains de toutes sortes les font vibrer leur fondation, mais elles sont toujours fidèles au poste.

 

L’environnement :

 

A l’origine, des arbres sont plantés sur les berges du canal pour stabiliser, surtout aux endroits où il surplombe les terrains avoisinants. Le saule, à la croissance rapide est très utilisé. On plante également des iris dont les rhizomes retiennent la terre des berges. Ce n’est qu’au XVIII° siècle que les arbres plantés le long du canal deviennent une source de revenus. Des mûriers sont plantés pour l’élevage du verre à soie en Languedoc, puis à la fin de la culture de la soie ils sont remplacés par des peupliers. Des arbres fruitiers ornent souvent les bords des ouvrages et des maisons d’éclusiers comme celle de Bordeneuve à Lespinasse.

A la révolution, le canal Royal du Languedoc ( canal du midi) compte environ 60 000 arbres sur tout son parcours. Dans la seconde partie du XIX° siècle ( 1850-1880) les plantations son peu à peu renouvelées. Le Platane que nous connaissons aujourd’hui devient l’essence dominante et imprime son empreinte sur l’image du canal. Depuis plusieurs années la maladie d’un champignon ravage les platanes . plus de 2000 arbres vont êtres abattus et brûlés sur place. La très belle écluse de Trèbes mondialement connue, située aux portes de Carcassonne vient de perdre tous ses platanes…. c’est un désastre environnemental. L’économie touristique va en souffrir indéniablement puisque les plaisanciers toujours nombreux ne bénéficieront plus de leur ombrage générateur de fraîcheur pendant la saison estivale…..

 

Les hommes du canal :

 

  • Les éclusiers :

Durant tout le siècle, les éclusiers travaillent sept jour sur sept , la navigation a lieu tous les jours depuis le lever du soleil jusqu’à une demi-heure après son coucher, sauf exception consentie par l’ingénieur en chef. Les dimanches et fêtes, le passage des écluses est interdit de 9 heures du matin à midi. Aucun passage n’est autorisé les jours de grande gelée et de débâcle.

Ces hommes entretiennent et font fonctionner à la force de leur bras les écluses dont ils sont responsables. Assermentés, ils peuvent dresser des procès-verbaux pour non-observation des règles très strictes régissant la vie sur le canal. Ils doivent savoir lire et écrire impérativement. Des cantonniers, regroupés en quatre stations, deux sur la rive droite et deux sur la rive gauche du canal, travaillent sous la responsabilité des éclusiers, de 6 heures du matin à 6 heures du soir du 1eravril au 1eroctobre, et du lever au coucher du soleil en hiver.

Dès le matin ils doivent contrôler la côte d’eau dans le bief amont et faire en sorte que celui-ci soit au bon niveau en évacuant de l’eau ou en demandant à l’éclusier amont d’en lâcher…Une baisse importante du niveau d’un bief peut avoir des conséquences graves. Les ouvertures des lourds vantaux, grandes portes en bois ( elles deviennent métalliques dans le seconde moitié du XX° siècle), des vantelles (vannes) de la porte se sont manuellement. En principe un éclusier met 20 minutes pour écluser une embarcation.

Un lien très fort unis les éclusiers ; c’est un travail d’équipe, de partage. Ils forment une communauté de compagnons voués à la voie d’eau….

Depuis plusieurs années l’automatisation du canal des deux mers est engagé, les éclusiers disparaissent progressivement, nos compagnons de l’eau, compagnon des mariniers, compagnons des cyclistes, compagnons des promeneurs s’éloignent, disparaissent tout comme les relations humaines, la convialité, l’échange des mots……et leur poésie.

 

  • Les bateliers : 

La batellerie est très florissante dès la fin du XVII° siècles et jusqu’au milieu du XIX° siècle . La profession est une histoire de famille où le savoir se transmettait de génération en génération.

Il existe une véritable hiérarchie entre les tireurs de cordes et les maîtres de bateaux ou les entrepreneurs. On trouve les « débardeurs » (gagne-petit), les matelots, les conducteurs, sans compter les personnes nécessaires à l’entretien du bateau. Parmi eux , les « capots », les charpentiers, les forgerons ou les peintres.

Les bateliers du canal latéral à la Garonne n’ont pas le même statut que ceux du canal du Midi. Aux alentours de 1900, sur le canal latéral , très peu de bateliers sont propriétaires de leur bateau. Ils ne sont que des salariés pour des compagnies de navigation. Le bateau était avant tout leur instrument de travail. Sur le canal du midi, nombreux sont les bateliers possédant leur propre bateau sur lequel ils vivaient. Ce n’est qu’à la fin de la première guerre mondiale, lorsque les compagnies du canal latéral à la Garonne commencent à péricliter, que de nombreux bateliers peuvent devenir propriétaires de péniches, vendues à des prix relativement modestes.

 

  • Le garde ambulant : 

Logé obligatoirement à ses frais dans un village bordant le canal , cet homme du canal armé d’un sabre doit faire au moins deux tournées par semaine, d’un bout à l’autre du canal, empruntant tantôt un chemin de halage, tantôt l’autre, à des jours et des heures différents, afin de n’être pas attendu….

 

Le transport :

 

Les bateaux de transport de marchandises qui sillonnent le canal dès son ouverture mesurent une vingtaine de mètres de long et sont halés par des chevaux et des hommes. On exporte du Languedoc, de la plaine du Lauragais, du blé, du vin et on importe du savon de Marseille, du riz, du poisson séché ou encore des épices, teintures , du bois.

Le tonnage des barques augmente au fil des siècles, passant de 60 à 120 tonnes au début du XIX° siècle. EN 1856 le transport de biens et de personnes connaît son apogée avec plus de 110 millions de tonnes de marchandises et 2100 000 passagers transportés. En 1914, il reste encore près de 200 bateaux, 300 chevaux et 75 mulets. Dans les années 1930, les péniches à moteur remplacent complètement la traction animale. La batellerie marchande disparaît complètement à la fin des années 1980.

 

Lors de la dernière guerre mondiale ( 1939-1945 ), la pénurie de carburant entraine la réapparition sur le canal de Garonne d’embarcations tiré par 2, 6 8 10 chevaux. Utilisées le plus souvent pour le transport de matériaux, céréales, objets divers, elles permet une liaison commerciale et un lien économique entre le cœur de Toulouse et la campagne Nord Toulousaine.. Le moulin de Lespinasse fait le plus souvent livrer son blé de la sorte.

 

Les chevaux sont pendant plus de deux siècles un élément essentiel au fonctionnement du canal, en tractant toutes sortes d’embarcations, du coche d’eau à la barque marchande. En effet le cheval peut haler jusqu’à 120 fois son poids dès lors que la charge est sur l’eau.

 

Les embarcations  sur le canal latéral :

 

Les premiers bateaux empruntant le canal sont « la sapine », le « Coutrillon », mais aussi beaucoup de barques en provenance du canal du midi. A l’époque ce sont les seuls bateaux habilités à naviguer sur le canal en raison de leur gabarit. La Sapine jauge de 40 à 60 tonnes, et se caractérise par son avant arrondi. Le Coutrillon est plus étroit et plus pointu que la Sapine. Circule aussi la barque de poste…(www.barquedeposte.org site de Robert Mornet, personnage passionnant, poète à toutes ses heures qui a commencé en 2007 le reconstruction d’une barque de poste qui circulait journellement sur le canal du Midi. Je n’ai jamais oublié notre rencontre dans un petit village niché au fond d’une verte vallée de la Cévenne près du Vigan (Gard)).

Selon le règlement de police de 1858, les bateaux naviguant sur le canal latéral à la Garonne font 30 mètres de long et 5.80 mètres de large. Ils sont halés par les animaux dès le début du XIX° siècle. Les bœufs sont remplacés par les chevaux, jugés plus efficaces. A partir de 1828 le halage est réglementé. Sa vitesse est de 3 km/heure en moyenne. Ce n’est que dans la seconde moitié du XIX° siècle que les bateaux à vapeur font leur apparition.

 

Economie du Canal de Garonne :

 

La rivalité entre le canal de Garonne et le chemin de fer a toujours été d’actualité. Par la loi du 17 juin 1846 , l’Etat octroye la construction de la ligne à une société qui ne fera aucun usage de la concession . Des appels d’offres sont alors lancées. Plusieurs candidats exigent non seulement la concession du chemin de fer, mais également la concession du canal de Garonne en cours de construction. L’Etat trouve un compromis et autorise la concession pour 99 ans des deux voies réunies. Cette concession est accordée aux frères Emiles et Isaac Pereire, James de Rothschild et Adolphe Eichtal, tous banquiers et hommes d’affaires….à Bordeaux . Ils fondent la Compagnie des chemins de Fer du Midi et du canal latéral à la garonne.

Entre les mains de ces financiers la faveur est donnée à la ligne de chemin de fer au détriment du canal où les tarifs sont volontairement exorbitants .

Repris par l’état, le canal latéral à la Garonne aura toutefois pendant près d’un siècle encore un rôle économique modeste, à l’époque des chalands de bois halés par des mules ou des chevaux, céréales, vins et eau-de-vie continueront d’y être transportés.

 

 

Destruction prochaine de nos deux maisons éclusières

 

Aujourd’hui, les pêcheurs à la ligne, les promeneurs à deux roues ou à pieds considèrent ce canal comme une voie verte encore préservée qu’ils parcourent de plus en plus nombreux.

Hélas tous ces promeneurs ignorent que les maisons éclusières de Lespinasse et de Bordeneuve, intégrées dans le patrimoine vert de notre région seront prochainement détruites pour faire place au TGV….. Une fois encore le rail du « modernisme » va détruire l’environnement de notre paradis vert….

 

 

 

Pour de plus amples informations ou renseignements contactez JJacques Druaux, conseiller municipal tel : 0662672735

 

Plan de la maison éclusière de Lacourtensourt  N°2.
Plan de la maison éclusière de Lacourtensourt N°2.
Ecluse de Fenouillet N°3 (Fenouillet).
Ecluse de Fenouillet N°3 (Fenouillet).
Plaque émaillée de l'écluse de Fenouillet N°3 (Fenouillet).
Plaque émaillée de l'écluse de Fenouillet N°3 (Fenouillet).
La maison éclusière de Lespinasse N°4, aujourd'hui.
La maison éclusière de Lespinasse N°4, aujourd'hui.
La maison éclusière de Lespinasse N°4, Avril 1984.
La maison éclusière de Lespinasse N°4, Avril 1984.
La maison éclusière de Lespinasse N°4, aujourd'hui.
La maison éclusière de Lespinasse N°4, aujourd'hui.
Plaque émaillée de l'écluse de Lespinasse exposée lors du forum des associtaions à Lespinasse, le 10 Septembre 2011.
Plaque émaillée de l'écluse de Lespinasse exposée lors du forum des associtaions à Lespinasse, le 10 Septembre 2011.
Croquis de la maison éclusière de Bordeneuve N°5 (archives VNF).
Croquis de la maison éclusière de Bordeneuve N°5 (archives VNF).
Croquis de la maison éclusière de Bordeneuve N°5 (archives VNF).
Croquis de la maison éclusière de Bordeneuve N°5 (archives VNF).
Croquis de la maison éclusière de Bordeneuve N°5 (archives VNF).
Croquis de la maison éclusière de Bordeneuve N°5 (archives VNF).
Croquis de la maison éclusière de Bordeneuve  N°5 (archives VNF).
Croquis de la maison éclusière de Bordeneuve N°5 (archives VNF).
Croquis de la maison éclusière de Bordeneuve N°5 (archives VNF)
Croquis de la maison éclusière de Bordeneuve N°5 (archives VNF)
Ecluse de Bordeneuve N°5.
Ecluse de Bordeneuve N°5.
Plaque émaillée de l'écluse de Bordeneuve  N°5.
Plaque émaillée de l'écluse de Bordeneuve N°5.
La maison éclusière de Bordeneuve N°5, aujourd'hui.
La maison éclusière de Bordeneuve N°5, aujourd'hui.
La maison éclusière de Bordeneuve N°5, aujourd'hui.
La maison éclusière de Bordeneuve N°5, aujourd'hui.